L’utilisation de cryptomonnaies confidentielles offre un quasi-anonymat. Il s’agit de leur principal attrait, mais c’est aussi la raison pour laquelle les exchanges abandonnent ces pièces et que les régulateurs les surveillent de plus en plus.
Le 1er janvier 2021, l’exchange Bittrex a annoncé qu’il supprimait trois des monnaies de confidentialité les plus populaires.
Le tweet de Bittrex citait un communiqué plus détaillé sur le site wel de l’entreprise, publié le 29 décembre 2020. Cependant, le fait qu’il n’y ait pas eu d’explications sur le retrait des cryptomonnaies en dehors d’une référence à sa politique de retrait s’est reflété dans la mauvaise note d’utilité de la page.
Cette nouvelle est tombée alors que l’examen des pièces de confidentialité s’est intensifié au cours des dernières années. Dans certains cas, des pays les ont même interdites.
Pour justifier ces fermetures et interdictions, les autorités invoquent la capacité de ces cryptomonnaies confidentielles à financer le terrorisme, la traffic des êtres humains et d’autres crimes. Cependant, les recherches ne fournissent que peu de preuves à cet égard, et certains soutiennent que les cryptomonnaies confidentielles peuvent être conformes à la réglementation anti-blanchiment d’argent (AML).
Dans cet article, nous allons expliquer ce que sont ces monnaies privées et comment elles fonctionnent à l’aide de quelques exemples. Nous verrons également pourquoi les exchanges prennent leurs distances par rapport à ces cryptomonnaies. Enfin, nous soulignerons brièvement leur impact potentiel sur l’industrie des technologies cryptées favorables à la protection de la vie privée.
Que sont les cryptomonnaies de confidentialité ?
L’une des caractéristiques les plus attrayantes des cryptomonnaies pour les utilisateurs est leur capacité à effectuer des paiements de manière plus anonyme.
Cependant, la blockchain étant une source ouverte, les transactions effectuées avec des cryptomonnaies telles que Bitcoin (BTC) sont visibles sur son registre distribué. La plupart des exchanges appliquent également des politiques de connaissance du client (Know Your Customer, ou KYC).
Les pièces confidentielles se rapprochent d’un idéal de transactions anonymes pour ceux qui accordent une grande importance à la confidentialité.
Les pièces de confidentialité sont toujours échangées sur le registre public, mais les adresses des portefeuilles sont cachées. Par conséquent, toute information permettant de remonter jusqu’au propriétaire du portefeuille est masquée. La transaction est toujours visible mais le quasi-anonymat de l’émetteur est obtenu grâce à la difficulté à retrouver l’adresse cachée du portefeuille.
Monero
Monero (XMR) est la monnaie privée la plus utilisée sur le marché. Son utilisation d’adresses furtives et de signatures en anneau rend les transactions intraçables.
Les adresses furtives agissent comme une couche cachée par laquelle transitent les transactions. Chaque portefeuille Monero possède une clé publique de visualisation et une clé publique d’envoi dans le cadre d’une adresse publique. Lorsqu’une transaction a lieu, le portefeuille de l’expéditeur utilise les deux clés du destinataire pour générer une adresse furtive unique. Bien que le registre public enregistre l’adresse furtive, seul le destinataire est conscient de sa propriété.
L’adresse furtive possède une clé de visualisation privée correspondante. Celle-ci permet au portefeuille du destinataire de rechercher l’adresse furtive sur la blockchain Monero. Une fois celle-ci trouvée, les fonds sont envoyés.
Les “signatures en anneau” rendent l’expéditeur anonyme. Un “cercle” d’utilisateurs signe les transactions avec l’expéditeur lorsque les fonds sont envoyés. Il est ainsi pratiquement impossible de déterminer qui est l’expéditeur réel. Ce processus est le mélange de transactions, que d’autres cryptomonnaies confidentielles utilisent également.
Dash
Dash (DASH) est une autre crypto populaire de protection de la vie privée. Cependant, la confidentialité n’est pas son objectif premier. Comme son nom l’indique en anglais, son objectif principal est la vitesse de transaction.
Toutefois, ses créateurs l’ont dotée de PrivateSend. Il s’agit d’un moyen d’effectuer des transactions en privé, qui s’est avéré populaire auprès des traders. Cette fonction optionnelle utilise le mélange de pièces via l’intégration de Coinjoin pour préserver l’anonymat des transactions.
Avec PrivateSend, une intention de transaction est envoyée d’un portefeuille Dash à travers le réseau vers différents nœuds maîtres. Là, il s’apparie avec l’autre partie de la transaction. Ensuite, ce nœud maître de jumelage mélange chaque “entrée” et les renvoie à chaque portefeuille correspondant, avec une adresse légèrement différente. C’est ce qu’on appelle un changement d’adresse.
Comme elles prennent plus de place sur la blockchain, ces transactions PrivateSend sont plus chères.
Zcash
Zcash (ZEC) est une autre cryptomonnaie de confidentialité populaire qui fonctionne également sur une blockchain publique.
Elle présente des transactions transparentes, où les adresses et autres détails sont affichés. Cependant, il existe également des transactions privées, qui sont cryptées. Dans ce cas, la blockchain enregistre uniquement le fait que la transaction a eu lieu.
Une paire de types d’adresses, les adresses z et les adresses t, facilitent ces transactions. Les transactions privées ont lieu entre les adresses z, tandis que les adresses t sont destinées aux transactions transparentes. Les deux types d’adresses peuvent également échanger entre elles, un processus appelé blindage ou déshuntage, selon le sens de la transaction.
Avantages et défauts des cryptomonnaies confidentielles
L’avantage le plus convaincant de l’utilisation des pièces privées est l’augmentation naturelle de la confidentialité et de l’anonymat des transactions. Cette absence de contrôle a un fondement philosophique et pragmatique.
D’une part, il y a ceux qui affirment que la vie privée est un droit de l’homme. De tels précédents ont été établis en citant des amendements à la Constitution des États-Unis. D’autre part, le fait de garder les transactions à l’abri des regards indiscrets évite les enquêtes, les investigations et les interférences.
Les pièces privées ne sont pas sans inconvénients. Tout d’abord, elles entraînent des frais de transaction élevés en raison de leurs paramètres supplémentaires. Elles ne sont donc pas idéales si l’utilisateur effectue des transactions relativement fréquentes.
Plus important encore, en raison de leur potentiel d’aide au blanchiment d’argent, les pièces privées souffrent d’une très mauvaise image.
Les interdictions croissantes des crypto de confidentialité
Alors que les cryptomonnaies sont de plus en plus adoptées, les exchanges qui les proposent sont confrontés à une pression réglementaire croissante.
L’une des conséquences est que les exchanges se distancient désormais des pièces de confidentialité pour ne pas avoir respecté les exigences d’anonymat.
L’exemple récent de Bittrex n’est que le dernier cas en date. CoinBase a cessé de supporter Zcash en août 2019, tandis qu’OKEx, en Corée du Sud, a fait de même le mois suivant.
Dans certains pays, une interdiction a été instituée à l’échelle nationale. Depuis le mois de mars, la Corée du Sud n’autorise plus ses exchanges crypto à héberger des monnaies privées. La Commission des services financiers (FSC) du pays a déclaré que cette interdiction est due au fait que ces pièces contribuent à faciliter les syndicats de cybercriminels et les blanchisseurs d’argent.
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