En résumé, Bitcoin est la nouvelle “monnaie fiduciaire” ou le nouveau “liquide” des milléniaux. Le seul actif à pouvoir être qualifié “d’argent” à long terme est l’or.
L’argent, qu’est-ce que c’est ?
Dans le chapitre IV de son ouvrage majeur “La richesse des nations” (1776), Adam Smith, considéré comme le père de l’économie politique moderne, décrit précisément la définition technique de la monnaie. L’argent est essentiellement défini comme une unité de compte, un moyen de paiement et une réserve de valeur.
Adam Smith explique comment l’or est rapidement devenu la monnaie standard. En plus d’être une ressource rare, l’élément chimique or (Au) est immuable dans le temps. Par la suite, son apparence physique et sa malléabilité l’ont popularisée en tant que forme d’argent universellement reconnu.
Bitcoin : est-ce de l’argent ?
Ma réponse simple et catégorique est la suivante : non. Dans sa forme actuelle, Bitcoin ne parvient pas à être de l’argent à presque tous les niveaux :
Unité de compte
Bitcoin n’est pas une unité de comptabilité car la valeur de référence de 1 BTC en 2009 est absolument différente de celle de 1 Bitcoin aujourd’hui. Les bitcoins ne peuvent pas être utilisés comme mesure comptable, car la “signification” de 1 BTC il y a quelques années est radicalement différente de celle de 1 BTC à l’heure actuelle.
Très peu de biens et de services sont tarifés en Bitcoin car pour refléter leur valeur, ils devraient constamment changer de prix ou encourir un risque comptable important. Généralement, les biens et services qui “acceptent” les bitcoins, n’acceptent pas le BTC comme unité de compte mais affichent un prix en monnaie locale et “peuvent être payés avec leur équivalence en bitcoins”.
Réserve de valeur
Bitcoin n’est pas une réserve de valeur car sa fluctuation est très indépendante des indicateurs d’inflation. Au contraire, il a tendance à fluctuer sur la base de la spéculation avec de fortes variations du pouvoir d’achat d’un jour à l’autre. Bitcoin souffre d’une extrême volatilité :
- Par exemple, en 2009, vous pouviez miner un Bitcoin pour quelques centimes sur le dollar de coût de l’électricité, disons 0,05$. En décembre 2017, le prix de Bitcoin était de 19 166 dollars.
- Ne pas confondre : “appréciation des prix et spéculation” avec “réserve de valeur”.
- En janvier 2018, un mois après le pic de décembre 2017, Bitcoin affichait toutefois un prix de 9 192 dollars. En décembre 2018, il s’élevait à 3 194 dollars.
- Sur le long terme, il n’a pas été prouvé que Bitcoin était une réserve de valeur. Il a même montré le contraire, étant un actif avec une instabilité des prix et une forte volatilité.
- Je ne recommanderais à personne de placer toutes ses économies, son loyer ou son argent dans Bitcoin car il n’est pas possible de savoir si la valeur du BTC restera stable d’une manière ou d’une autre.
- Bitcoin est avant tout un actif spéculatif.
Bitcoin comme moyen de paiement
Bitcoin est un moyen d’échange du fait qu’il s’agit d’un système électronique de pair à pair, mais il s’avère très peu performant.
Bitcoin peut exécuter en moyenne 4 transactions par seconde. En comparaison, les systèmes de Mastercard ou Visa sont capables d’exécuter 24 000 transactions par seconde. En termes de moyen d’échange, il est donc bien inférieur aux systèmes de paiement actuels, bien qu’il s’agisse d’une technologie nouvelle.
Le BTC est-il collectionnable ?
Le processus de découverte des nouveaux prix de Bitcoin souffre d’un manque de transparence dans les livres d’ordres des marchés boursiers (dont beaucoup ne sont pas réglementés) et d’un manque de liquidité. En effet, Bitcoin est concentré dans les mains de seulement quelques-uns (2% des portefeuilles contrôlent 95% de tous les bitcoins).
Bitcoin est donc sujet à des chutes soudaines en raison de l’absence d’ordres simultanés d’achat et de vente.
En réalité, les grandes transactions sont effectuées de gré à gré (Over The Counter, ou OTC), c’est-à-dire en dehors du marché, avec un troc entre grandes contreparties. Ainsi, le coyrs ne reflète pas nécessairement l’offre et la demande constantes. L’analogie avec l’art est pertinente, ce pour les raisons suivantes :
- En tant que tel, Bitcoin véhicule une idée bien plus qu’une utilité réelle.
- Son offre est limitée, ce qui en fait une marchandise rare.
- Il s’agit plutôt d’un objet de luxe à la disposition des “classes” supérieures de la société (celles qui ont les moyens de spéculer). Aujourd’hui, les barrières à franchir pour accéder à Bitcoin sont nombreuses, il faut être bancarisé et suffisamment compétent en matière de technologie. Il s’agit d’un totem hipster de la classe supérieure.
Si Bitcoin n’est pas de l’argent, pourquoi l’or en est-il ?
Tout au long de l’histoire, les métaux précieux sont rapidement devenus la norme en termes de détention de la valeur. Plus de 3 000 ans avant Jésus-Christ, l’ancienne Mésopotamie, l’Égypte et les civilisations grecque, aztèque et maya sont toutes arrivées à la même conclusion : l’or est une forme d’argent.
Les métaux précieux ont de loin la plus longue histoire en tant que réserve de valeur, moyen d’échange et unité de compte.
L’or a de plus une valeur intrinsèque, en raison de l’usage du métal physique dans la fabrication de bijoux, l’ornementation et d’autres domaines tels que l’électronique, les outils de précision et la médecine.
Contrairement à Bitcoin, l’or a une volatilité beaucoup plus faible, voire plus faible que les principales devises de type fiat.
Historiquement, on peut affirmer que la proportion d’or détenu par les entités privées et publiques ainsi que les banques centrales est le résultat des flux commerciaux et des soldes entre les nations au fil du temps, avec leurs réserves d’or respectives.
Si une “réinitialisation monétaire” majeure devait avoir lieu, le consensus à travers le monde serait alors très probablement l’or. Il est très peu probable que les institutions mondiales dans leur ensemble permettent à “quelques intellos de 2009” de devenir les bénéficiaires du plus grand transfert de richesse que le monde ait jamais connu dans toute son histoire.
Quelle est la meilleure alternative aux monnaies fiduciaires ?
Tout d’abord, Bitcoin n’est pas le “nouvel or” car il n’a pas ses propriétés physiques ni sa valeur intrinsèque. De plus, Bitcoin ne remplit pas les critères nécessaires pour être considéré comme étant “de l’argent”.
À mon avis, Bitcoin est un actif numérique spéculatif qui se comporte parfois comme une œuvre d’art et parfois comme de l’argent liquide pour la génération des milléniaux, mais qui reste très spéculatif et volatile.
À vrai dire, l’entité anonyme Satoshi Nakamoto, créateur de Bitcoin, explique très bien dans son livret blanc ce que le BTC vise à devenir : “Bitcoin : un système électronique de paiement de pair à pair”.
La sémantique nous amène à étudier le mot anglais “cash”. Le terme “cash” désigne les espèces, la monnaie ou le fiat n’est pas du “cash”. Bitcoin est : “Un système de monnaie électronique de pair à pair” et non “Le système de monnaie électronique de pair à pair”.
Ainsi, à mon humble avis, Bitcoin est une meilleure monnaie fiduciaire ou une alternative au liquide, mais ce n’est toujours pas de l’argent. Il s’agit d’une monnaie électronique privée qui a la valeur d’un écosystème électronique, comme un jeton dans un parc d’attractions, mais tout cela n’est finalement qu’un conte de fées. Comme l’argent liquide ou les monnaies fiduciaires, il n’a qu’une valeur subjective basée sur la confiance.
Pour rendre justice à Bitcoin, je crois personnellement aux idéaux libertaires du BTC et je pense que dans son ensemble, il a produit plus de bien que de mal. Ne serait-ce qu’en réveillant la remise en cause de notre système de monnaie fiduciaire et du système bancaire de réserves fractionnaires….
Le plus important est peut-être de poser la question fondamentale : qu’est-ce que l’argent ? Pour répondre à cette question, je citerai la paraphrase de John Pierpont Morgan (J.P. Morgan) lors de son témoignage devant le Congrès américain en 1912 : “L’or est de l’argent réel, le reste n’est de l’argent que par décret”.
Auteur : Thierry Arys Ruiz
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