Présent lors de l’événement LEDGER OP3N à la Gaîté Lyrique à Paris, BeinCrypto a pu s’entretenir avec Pascal Gauthier, le PDG de la Licorne française Ledger, ce après la conférence de presse annonçant leur nouveau produit Ledger Stax.
L’annonce, aux allures de lancement du premier iPhone,était digne d’un show hollywoodien dans lequel un des piliers d’Apple était au rendez-vous. Tony Fadell, le “père de l’iPod” a présenté le nouveau produit Ledger dont il a tenu les rênes, un appareil enfin facile d’utilisation, enfin design, enfin fashion.
Parmis les caractérisques du produit, on peut citer : un écran E Ink tactile de la taille d’une carte de crédit à tranche incurvée pour indiquer ce qu’il contient tel la tranche d’un livre, une batterie super longue durée, rechargeable en USB-C ou sans fil, une connectivité sécurisée, simple et rapide pour un échange de crypto actifs plus facile.
Voici nos questions à celui qui est à la tête de Ledger depuis 2019 :
BeinCrypto : Pensez-vous que la chute de FTX et BlockFi va encourager les utilisateurs à favoriser les cold wallets ?
Pascal Gauthier :
Novembre 2022 a été le meilleur mois pour Ledger. On y a même connu notre meilleure semaine et notre meilleure journée. On voit donc déjà l’impact et ça rappelle à tout le monde les fondamentaux “Not your keys not your coins” (pas votre clé, pas vos cryptomonnaies) d’une manière très violente à tout le monde.
Du coup de nombreux utilisateurs se tournent vers nous. C’est donc positif pour Ledger qui en profite. Ceci dit c’est aussi bon pour l’écosystème car cela rappelle un autre fondamental qui est : il faut utiliser ses clés. Dans le sens de la utility, il faut se concentrer sur les cas d’usage et pas que sur la spéculation.
BeinCrypto : C’était donc le bon moment pour lancer Stax ?
Pascal Gauthier :
Oui c’est fortuit, de toute façon on le lançait quoiqu’il arrive mais c’est vrai que ça a créé des conditions favorables pour le lancer. Cela arrivait à point nommé dans un marché qui en a besoin.
BeinCrypto : Et êtes-vous prêt chez Ledger à faire face à un potentiel développement à grande échelle ?
Pascal Gauthier :
Oui, bien sûr. C’est sûr que toute compagnie est en mesure de faire une centaine de pièces d’un hardware. Mais faire un très beau hardware comme Stax et aussi avoir la capacité d’en imprimer des millions, ça c’est une autre paire de manches. Ce qu’on a réussi à faire chez Ledger ces dernières années est la partie immergée de l’iceberg, c’est toute la capacité opérationnelle de Ledger à pouvoir produire à grande échelle ?
BeinCrypto : En tant que PDG de Legder, croyez-vous en l’avenir des plateformes d’échanges centralisées ?
Pascal Gauthier :
Les plateformes centralisées ont un avantage : c’est qu’elles permettent aux gens de rentrer de fiat en crypto. Ça on est obligé de le faire et pour l’instant on ne sait pas le faire de manière décentralisée. Par conséquent, je pense qu’elles ont donc un avenir.
Binance, par exemple, reste la plateforme majoritaire du marché, mais on a aussi Coinbase, Kraken et Bitfinex, donc on a des plateformes centralisées qui existent et qui valent le coup. Par contre, il y a peut-être des choses qui vont changer dans la gouvernance de ces plateformes centralisées, afin qu’elles ne fassent plus le trading et la custody mais que ces deux activités soient ségréguées comme cela se passe dans le monde normal du trading. La finance crypto centralisée continuera d’exister. Ce que ça risque de créer, c’est qu’il y aura d’autres acteurs un peu plus sérieux et institutionnels qui vont rentrer sur le marché et remplir le rôle de ces plateformes. Il y a déjà une tentative avec Bullish, par exemple mais pas que.
De notre côté, on travaille de manière très proche avec la grande banque japonaise Nomura ; on a fait une joint venture qui est un custodial régulé. Nomura vient aussi de lancer une division crypto : Laser Digital. Donc les grandes institutions financières se mettent aussi à la crypto et c’est probablement comme ça que la crypto va s’en sortir pour tout ce qui est de la finance centralisée : en faisant confiance à des acteurs de référence.
BeinCrypto : Quelle est votre vision des MNBC (Monnaies Numériques de Banques Centrales) ?
Pascal Gauthier :
C’est une question difficile parce qu’elles ne sont pas toutes sorties. Par exemple le crypto euro, on ne sait pas trop ce que c’est. Ce qui est sûr c’est que l’exemple à ne pas suivre c’est l’exemple chinois. Ça c’est tout ce qu’on ne veut pas, c’est la dystopie de style 1984 / Big brother à éviter.
Une fois qu’on évite ça, si ça correspond aux critères des cryptomonnaies, c’est à dire qu’on peut être anonyme mais les transactions sont transparentes et enregistrées sur une blockchain publique, alors ok si ça respecte ça. Il faut que les gouvernements résistent impérativement à leur désir de contrôle.
BeinCrypto : On a entendu à la conférence que 30n % des cryptomonnaies dans le monde étaient détenues sur des portefeuilles Ledger. Ça ne veut pas forcément dire que 30 % des utilisateurs crypto ont un portefeuille Ledger. On pourrait penser que les clients Ledger sont plus souvent des gros porteurs ou des personnes qui travaillent dans le Web3 plutôt que des petits porteurs. Avec Ledger Stax, pensez-vous que le cold wallet deviendra un produit grand public ?
Pascal Gauthier :
On peut penser cela mais c’est difficile pour vous de savoir. Nous nous avons les chiffres et en fait il y a entre 10 et 15 % des utilisateurs crypto qui ont un ledger et ça répresente 20 % des cryptomonnaies, donc c’est beaucoup plus équilibré que ce qu’on dit.
Il n’y a qu’à faire un test : moi quand je vais dans n’importe quelle conférence, quand je demande qui a un Ledger, j’ai soit toute la salle qui lève la main soit 30 %, soit 70 %, soit 50%, donc les gens qui sont dans la crypto ont des Ledger ? Par contre, il y a une distinction qui n’est pas faite. On a 300 millions de gens qui sont dans la crypto. Ce n’est pas exactement vrai, parce que pour moi, acheter du Bitcoin sur Binance n’est pas être dans la crypto. C’est comme si on va sur Robinhood et qu’on achète un stock Apple.
Donc dans les gens qui utilisent vraiment la crypto, ça il y a des chiffres ; c’est assez compliqué de savoir, il y a des chiffres qui sortent mais ce n’est pas 300 millions d’utilisateurs aujourd’hui. Donc la crypto ça reste assez niche, même si tu regardes les stats d’Opensea qui sont là, je crois qu’il y a 400 000 utilisateurs uniques par mois : le chiffre est très petit, Sorare c’est quelques centaines de milliers de joueurs, pas plus. On est encore dans les balbutiements d’une grande industrie.
Oui donc Stax est une tentative de devenir grand public. Et c’est surtout de dire aux gens qui ne sont pas encore dans la crypto ou qui hésitent à posséder leur clé privée, qu’on a fait des efforts et que c’est plus simple sur l’expérience utilisateurs. C’est la fin de ma conférence à LEDGER OP3N : Qu’est ce qu’on peut faire de plus ? On peut améliorer l’expérience utilisateur. Tout cela va dans ce sens là. J’espère que Stax va passer la prochaine centaine de millions d’utilisateurs sur la crypto mais on va voir ce qui se passe dans les prochains mois.
BeinCrypto : Au-delà de la sécurisation des cryptomonnaies, quels sont les projets de Ledger en matière de protection de données personnelles et d’identité numérique ?
Pascal Gauthier :
Ledger est un service qui sécurise tous vos secrets. Du moment que l’identité ou les attributs que vous venez de citer est protégé par un secret cryptographique, à ce moment-là, il peut être protégé par ton Ledger et c’est ça qui permet de le transférer quelque part ou de signer avec. Dans ce sens là, tout ce que vous venez de décrire pourrait être protégé par Ledger.
Ledger et Stax sont une plateforme ouverte de développement et ainsi les prochains cas d’usage seront codés par des développeurs softwares qui vont utiliser Ledger comme sécurité.
BeinCrypto : Quel marché dans le monde est actuellement le plus profitable pour Ledger ? Le plus prometteur ? Où pensez-vous pouvoir grossir le plus ?
Pascal Gauthier :
Il n’y a pas vraiment de choix à faire de manière assez magique. C’est à dire que souvent certains business, qui sont très ancrés dans un pays ou dans une région, alors que nous avons la chance d’envoyer des produits de partout dans le monde et ce n’est pas juste un gimmick marketing, c’est une réalité de la cryptomonnaie. Ça se comprend d’ailleurs assez bien, la cryptomonnaie se développe partout. Certains pays sont un peu plus en avance que d’autres mais pas de pays complètement à la traîne.
Et d’ailleurs, de manière assez intuitive, des pays comme le Liban ou l’Argentine, qui souffrent d’avoir des monnaies mal gérées, sont des pays où les utilisateurs sont très ouverts aux cryptos. Alors qu’on pourrait souvent les mettre en queue de peloton sur tout ce qui est innovation technologique, là la situation financière fait qu’ils remontent assez haut dans la liste.
Les marchés secoués dans leur économies s’intéressent à Bitcoin pour des raisons différentes que des marchés américains, mais c’est ce qui fait qu’à la fin tout prend en même temps.
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