Solana a connu une croissance exponentielle depuis son entrée sur le marché en tant que blockchain alternative de Layer-1, ou couche 1. Bien que la capitalisation boursière du réseau soit encore nettement inférieure à celle d’Ethereum, son principal concurrent, cet écart s’est considérablement réduit au fil des années.
À mesure que Solana se développe, certains se demandent si elle remplacera Ethereum en tant que deuxième plus grande crypto-monnaie derrière Bitcoin. Dans une conversation avec BeInCrypto, Juan Pellicer, analyste principal chez IntoTheBlock, a cependant expliqué que Solana doit encore surmonter plusieurs obstacles avant que cela soit possible.
La croissance remarquable de Solana
Après Bitcoin, Ethereum a solidifié sa position en tant que crypto-monnaie de premier plan, pionnière du concept de contrats intelligents et plateforme dominante pour les applications décentralisées.
Cependant, la domination d’Ethereum a récemment été remise en question par l’émergence de concurrents comme Solana, qui est entré sur le marché en mars 2020 en tant que réseau blockchain alternatif de Layer-1.
Bien qu’Ethereum maintienne un avantage considérable en termes de capitalisation boursière par rapport à Solana, cet avantage s’est trouvé notablement réduit au fil des années.
Depuis son lancement en mars 2020, la capitalisation boursière de Solana a atteint son premier pic en novembre 2021 à 72,4 milliards de dollars. Il y a une semaine, le token a dépassé la barre des 100 milliards de dollars, un nouveau sommet record.
Au moment de la rédaction de cet article, la capitalisation boursière d’Ethereum est de 392 milliards de dollars. Bien que son avantage sur Solana soit encore important, certains commencent à se demander d’ici combien de temps le SOL dépassera l’ETH.
Alors que le réseau dépasse actuellement des indicateurs clés comme les utilisateurs actifs quotidiens, les transactions quotidiennes et le nombre de nouvelles adresses créées mensuellement, certains affirment que 2025 sera l’année où Solana prendra la deuxième place du classement crypto derrière Bitcoin.
Cependant, bien que le succès de Solana soit impressionnant, selon Pellicer, il lui manque encore certains éléments indispensables pour détrôner Ethereum.
« Bien que Solana puisse continuer à croître et potentiellement dépasser Ethereum dans des branches spécifiques, il est encore peu probable que [le réseau] surmonte bientôt la position bien établie d’Ethereum en tant que plateforme dominante, ce malgré le paysage concurrentiel dynamique et en évolution », a-t-il expliqué.
Pellicer a pris en compte de nombreux facteurs avant d’arriver à cette conclusion.
La rapidité de traitement et de faibles coûts maintiennent la compétitivité de Solana
Solana et Ethereum possèdent des forces distinctes qui attirent chacunes des publics différents.
La domination maintenue d’Ethereum se trouve largement due à la confiance dont le réseau dispose au sein du secteur ainsi qu’à son adoption généralisée et ses efforts constants en matière de développement. Ainsi, en tant que première plateforme à permettre le développement d’applications décentralisées, Ethereum demeure en tête du marché, alimentant la plupart des projets de finance décentralisée (DeFi) et hébergeant les plus importantes marketplaces de jetons non fongibles (NFT).
« L’infrastructure d’Ethereum est inégalée en matière de sécurité économique, avec un record de disponibilité sans faille depuis sa création, ce qui favorise une confiance inégalée pour les applications institutionnelles et de grande valeur. Son écosystème DeFi reste le plus mature, des protocoles pionniers ayant établi des normes au sein de l’industrie, ce bien que des concurrents comme Solana comblent rapidement l’écart avec des alternatives plus rapides et moins coûteuses », a expliqué Pellicer à BeInCrypto.
L’avantage concurrentiel de Solana réside dans son débit élevé et ses faibles coûts de transaction. Le réseau utilise deux mécanismes de consensus : Proof-of-History (PoH) et Proof-of-Stake (PoS).
La combinaison des mécanismes de PoS et PoH permet aux nœuds individuels de valider l’ensemble de la blockchain en n’utilisant qu’une petite partie de l’information. En effet, la PoH crée un historique vérifiable des transactions, ce qui signifie qu’un nœud n’a pas besoin d’être constamment connecté au réseau pour vérifier sa validité. En conséquence, les vitesses de transaction sont beaucoup plus rapides.
Initialement basé sur un mécanisme de consensus de Proof-of-Work (PoW), Ethereum est passé à la PoS en septembre 2022. Néanmoins, le réseau souffre souvent de congestion et de vitesses de transaction lentes.
Alors qu’Ethereum ne peut traiter qu’environ 15 transactions par seconde, Solana peut en gérer plus de 2 600.
« Cela se traduit par une expérience utilisateur plus fluide, en particulier pour les applications à haute fréquence et les utilisateurs de détail. Cette différenciation technologique, associée à un marketing efficace et à un écosystème dynamique d’applications axées sur la rapidité et l’accessibilité, a alimenté la croissance rapide de Solana et l’augmentation de sa capitalisation boursière, attirant des utilisateurs et des projets en recherche d’alternatives aux importants frais de gaz d’Ethereum et au processus de transaction finale plus lent » a expliqué Pellicer.
Cependant, Ethereum possède d’autres avantages qui compensent la rapidité de Solana.
Ethereum excelle dans la DeFi
Depuis son lancement en 2015, Ethereum est devenu une plateforme blockchain très utilisée par les développeurs et les entreprises.
La fonction de contrats intelligents de la plateforme ont permis de créer de nombreuses applications décentralisées (dApps), contribuant à la croissance des écosystèmes axés sur la DeFi, le gaming et les NFT.
Aujourd’hui, la valeur totale verrouillée (TVL) de la DeFi basée sur Ethereum s’élève à près de 124 milliards de dollars.
« Cela crée une liquidité profonde, une infrastructure robuste et un écosystème riche, et à laquelle il sera difficile de répliquer pour les plateformes plus récentes comme Solana. Cet effet de réseau enraciné confère à Ethereum un considérable avantage concurentiel ainsi qu’en termes d’inertie, car les utilisateurs et les développeurs bénéficient de l’infrastructure existante, du soutien communautaire et des protocoles établis au sein de l’écosystème Ethereum », a dit Pellicer.
Un autre moteur de la solide base de développeurs d’Ethereum est son usage de Solidity comme langage de programmation de base.
Solidity est un langage spécifiquement conçu pour les contrats intelligents et la machine virtuelle Ethereum (EVM). Il bénéficie d’un écosystème mature, d’une vaste gamme d’outils et d’un large vivier de développeurs déjà compétents.
En parallèle, le langage de programmation principal de Solana est Rust. Ce système offre pour sa part des avantages en termes de rapidité de performance et de sécurité globale.
« Bien que Rust offre des avantages en termes de vitesse d’exécution et de sécurité, il présente une courbe d’apprentissage plus abrupte et une communauté de développeurs plus restreinte dans l’espace blockchain par rapport à Solidity. Cette différence peut influencer les taux d’adoption par les développeurs et les types d’applications créées, Ethereum attirant initialement un éventail plus large de développeurs, tandis que Solana peut séduire ceux qui se concentrent sur les applications critiques en termes de performance et ceux déjà familiers avec Rust », a ajouté Pellicer.
Ethereum reste également le réseau préféré des utilisateurs qui privilégient la décentralisation avant la vitesse.
Des inquiétudes concernant la centralisation de Solana
Les exigences des nœuds validateurs de Solana, qui nécessitent de considérables investissements matériels, peuvent créer des barrières à l’entrée, conduisant potentiellement à une concentration du pouvoir au sein du réseau parmi ceux capables de couvrir les frais d’infrastructure nécessaires.
Bien que Solana compte actuellement environ 2 000 validateurs actifs, Ethereum a dépassé le seuil d’un million l’année dernière – soit le plus grand nombre enregistré par un réseau blockchain. Bien que la dépendance de Solana à ce type de matériel accélère le réseau, cela a également soulevé certaines préoccupations quant à savoir si ce taux d’efficacité élevé est atteint au détriment de la décentralisation.
Lors de la conférence Token2049 d’octobre dernier, Edward Snowden a attiré l’attention sur ce même point.
Par le biais d’un lien vidéo, Snowden a exprimé des préoccupations selon lesquelles l’accent mis par Solana sur la vitesse et l’efficacité se fait au détriment de la décentralisation, qu’il considère comme essentielle pour assurer la fiabilité de la technologie blockchain. Il a également expliqué qu’en conséquences, le réseau est alors plus susceptible d’être influencé par le gouvernement.
Ses commentaires reflétaient d’ailleurs les doutes partagés par de nombreux membres de la communauté crypto.
« Solana fait face à des préoccupations valides concernant la centralisation en raison de ses exigences matérielles pour les validateurs et de son ensemble de validateurs relativement plus restreint, ce qui pourrait potentiellement conduire à un contrôle du réseau par un nombre réduit d’entités. Bien que Solana privilégie la performance avec un compromis potentiellement plus élevé en termes de centralisation, Ethereum privilégie la décentralisation et la sécurité, désormais avec une meilleure efficacité énergétique et des mises à jour constantes de sa scalabilité », a déclaré Pellicer.
Pour que Solana devienne plus compétitif, le réseau devra aborder ces risques.
La clé au trône d’Ethereum
Solana devra prendre plusieurs mesures clés pour surpasser Ethereum en termes de part de marché et d’influence. Selon Pellicer, le réseau devra surmonter quatre obstacles spécifiques.
« Premièrement, il sera crucial d’atteindre la parité ou surpasser Ethereum en termes d’adoption par les développeurs, ce qui requiert un investissement significatif dans les outils pour développeurs et le développement de la communauté. Deuxièmement, Solana doit cultiver des applications DeFi véritablement innovantes et uniques qui le différencient au-delà des avantages de vitesse et de coût. Troisièmement, aborder les préoccupations de centralisation et démontrer la stabilité et la résilience à long terme du réseau sont essentiels pour attirer le capital institutionnel et une confiance plus large. Enfin, Solana devra s’approprier des segments de marché émergents ou des cas d’utilisation où Ethereum est moins dominant afin de se tailler une véritable position de leader » a-t-il indiqué.
Solana a présenté des produits futurs dont le lancement est prévu cette année. Parmi eux, on trouve Solana Seeker, un smartphone alimenté par Android et conçu pour les applications Web3. Cet appareil offre une fonctionnalité et un design améliorés pour les utilisateurs qui interagissent avec l’écosystème Solana, notamment la gestion des actifs crypto.
En parallèle, Firedancer, futur client validateur de Solana, est conçu pour améliorer la stabilité du réseau et le traitement des transactions. Sa base de code distincte offre une plus grande résilience contre les pannes généralisées et devrait améliorer la performance de Solana.
Aux États-Unis, on note une forte attente concernant le lancement potentiel d’un fonds négocié en bourse (ETF) au comptant sur Solana. Il reste à voir dans quelle mesure ces initiatives contribueront à une adoption accrue du réseau.
La scalabilité, l’éternel talon d’Achille d’Ethereum
Ethereum doit aborder ses proores points problématiques afin de maintenir sa domination sur le marché crypto. La scalabilité reste un défi central pour cet écosystème.
L’architecture actuelle du réseau, qui ne peut gérer qu’un nombre limité de transactions par seconde, limite sa capacité à répondre à la demande croissante des utilisateurs. Ces derniers ont en effet tendance à subir une congestion intense du réseau, ce qui entraîne des temps de transaction plus lents et des frais accrus pour ceux qui interagissent avec les dApps d’Ethereum.
En réponse à ses problèmes, Ethereum a développé un écosystème de couche 2, ou Layer-2, afin de réduire la congestion. Cependant, ces solutions ont été critiquées du fait qu’elle entraîneraient une fragmentation des utilisateurs.
« Ethereum doit continuer à innover et à déployer avec succès ses solutions de scalabilité pour maintenir son avantage concurrentiel. [Le projet] doit s’assurer que son écosystème Layer-2 soit fluide et accessible », a expliqué Pellicer à BeInCrypto.
De plus, il s’avérera essentiel pour Ethereum de protéger et développer les aspects qui le rendent déjà si compétitif afin de maintenir son avance sur les autres réseaux.
« Pour Ethereum, le succès durable repose sur la scalabilité réussie de son écosystème grâce aux solutions de Layer-2, à une innovation continue dans la DeFi et à des domaines d’application plus larges, ainsi qu’au maintien de sa forte communauté de développeurs », a-t-il indiqué.
Bien que Pellicer ne s’attende pas à ce que Solana dépasse Ethereum de sitôt, des enjeux croissants entre les réseaux concurrents est un bon signe.
« En fin de compte, une concurrence accrue et l’émergence d’une plateforme alternative forte comme Solana pourraient être bénéfiques pour l’ensemble du marché crypto, favorisant l’innovation et stimulant l’adoption en offrant aux utilisateurs plus de choix et de fonctionnalités diversifiées », a-t-il ajouté.
Ainsi, si Solana peut continuer à grimper dans les rangs, seul le temps et ses actes nous le dira.
Morale de l’histoire : Qui dépasse un Cardano dépasse un Ethereum.
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