Malgré tous leurs efforts, les développeurs de jeux Web3 restent à la traîne par rapport à leurs homologues Web2. Les tracas liés à la gestion des clés privées constituent un véritable inconvénient, en particulier pour les gamers qui se sont habitués aux jeux vidéo traditionnels des années 80 et 90.
Si vous avez eu la chance de naître dans les années 90, vous avez probablement déjà joué à Tekken ou à FIFA sur votre console. Malgré leur simplicité, les jeux vidéo des années 90 nous font encore rêver. Ces jeux cultes, qui ont marqué toute une génération, continuent d’inspirer les studios de gaming les plus prestigieux.
Blockchain, une révolution dans le monde du gaming ?
Dans les années 90, les gamers pouvaient échanger leurs disquettes de jeux vidéo ou même les revendre. Quelques années plus tard, les studios de jeu ont commencé à tester de nouvelles méthodes de distribution pour remplir leurs caisses. Résultat : les prix des jeux vidéo ont flambé. Et puis vint le Web3.
Lancé en 2015, Ethereum, le premier réseau blockchain programmable au monde, a redéfini la décentralisation de l’argent. Il a également changé notre façon de voir ce que nous possédons.
Quelques années plus tard, les gamers qui ne juraient que par les jeux vidéo traditionnels ont commencé à se poser des questions. Avec le Web3, ils ne sont plus obligés de subir les moqueries de leurs familles parce qu’ils ont dépensé 100 $ dans un jeu vidéo. Car désormais, ils ont la possibilité d’échanger leurs actifs de jeu contre de l’argent réel.
Seule ombre au tableau : les jeux Web3 nécessitent des wallets, des clés privées et des adresses crypto.
Certes, les gamers sont généralement de grands férus de technologie. Néanmoins, la blockchain peut s’avérer plus compliquée qu’on ne le pense.
Pour éclairer nos lecteurs à ce sujet, nous nous sommes entretenus avec Jérôme de Tychey, PDG de la plateforme de jeux Cometh et président d’Ethereum France. D’après lui, les développeurs de jeux Web3 ont commis plusieurs erreurs. Néanmoins, il existe des remèdes à tous les maux de la blockchain.
Mais tout d’abord, nous devons comprendre comment nous en sommes arrivés là.
Comment fonctionnent les applications blockchain ?
Lancée en 2015, Ethereum a été la première blockchain au monde à proposer des smart contracts. Basés sur un langage de programmation spécial, ces contrats dits “intelligents” permettent de régir les plateformes de finance décentralisée et d’autres types de dApps.
Pour activer un smart contract, le développeur doit l’envoyer à une adresse spécifique sur la blockchain Ethereum. Ensuite, les autres membres du réseau peuvent utiliser leurs propres adresses pour interagir avec ce contrat.
Par exemple, pour envoyer des fonds à un smart contract, l’utilisateur doit signer la transaction avec sa clé privée, une longue chaîne de chiffres qui permet aux adresses crypto de valider leurs transactions.
La plupart des transactions blockchain sont gérées par des wallets, ou des portefeuilles crypto. En plus de la clé privée, le détenteur du portefeuille crypto doit choisir une phrase secrète de 24 mots qu’il pourra utiliser en cas de perte de son wallet. Ainsi, un utilisateur qui perd sa phrase secrète perd l’accès à sa crypto.
Les développeurs de jeux Web3 ont-ils oublié les gamers ?
La plupart des développeurs de jeux Web3 permettent aux gamers de gérer eux-mêmes leurs clés privées. Les gamers sont habitués aux nouvelles technologies, ils ne devraient donc avoir aucun mal à protéger leurs actifs de jeu. N’est-ce pas ?
Pas vraiment, selon Jérôme de Tychey, fondateur et PDG de Cometh et président d’Ethereum France.
“… La gestion des utilisateurs Web3 est un processus en deux étapes. Tout d’abord, vous donnez une clé publique au joueur. Ensuite, vous le laissez interagir avec votre jeu via cette clé.
Néanmoins, des questions difficiles surgissent une fois que le joueur doit utiliser [sa] clé. Comment payer les frais de gaz ? Comment relayer les transactions ? Comment mettre à jour le jeu à partir de ce qui vient de se passer sur la blockchain ?”
Ces questions ne font qu’effleurer la surface des problèmes bien plus profonds qui affligent les jeux blockchain. Selon Jérôme de Tychey, les développeurs de jeux ont essayé de faciliter la vie des joueurs en utilisant plusieurs techniques, notamment en stockant la clé dans des endroits relativement sûrs et en utilisant la gestion des clés à distance,
Toutes ces techniques ne sont que des solutions de contournement, note Jérôme de Tychey. L’idéal serait de déposer la clé privée dans un smart contract qui assure la sécurité avec l’abstraction de compte.
L’abstraction de compte permet au gamer de gérer ses adresses et de les programmer à l’aide d’un smart contract. En effet, le smart contract crée un wrapper personnalisable (dans le jargon informatique, un wrapper est un programme ou un code visant à simplifier un système complexe) avec des informations qui peuvent être transférées sur différentes applications. Un compte représenté par un smart contract l’emportera toujours sur un compte représenté par une adresse externe.
Avec ce wrapper, les utilisateurs peuvent définir des règles de sécurité client et créer des files d’attente pour exécuter des transactions complexes. Ils peuvent également créer des clés de secours qui autoriseront la création d’une nouvelle clé.
Les transactions importantes peuvent être vérifiées avec plusieurs clés, tandis que les petites transactions peuvent être validées avec une seule clé. Le smart contract pourrait permettre aux joueurs de créer une session de confiance pour autoriser de nombreuses petites transactions.
Cela dit, le fait de devoir valider plusieurs transactions à la fois risque de faire fuir les nouveaux joueurs. Selon Michael Sanders de Horizon Blockchain Games, les développeurs Web3 doivent se concentrer sur l’expérience d’immersion pour favoriser l’engagement des joueurs.
Pour conclure
D’après Jérôme de Tychey, les joueurs ne doivent pas savoir ou se soucier de savoir si leurs jeux sont Web2 ou Web3. Ils doivent plutôt profiter de l’expérience de jeu.
“La blockchain peut impacter le gameplay lorsqu’elle est très utilisée, mais elle offre également de nouvelles possibilités pour la conception de jeux. Fidèles à cette philosophie, nous refusons de construire nos jeux sur des modèles Play to Earn. Nous croyons en la blockchain pour sa capacité à renforcer les liens entre les joueurs et leurs jeux préférés”.
Alors que les jeux Web3 de première génération donnaient la priorité à l’économie de jeu, les nouveaux jeux peuvent apprendre de leurs erreurs et se concentrer sur l’expérience de jeu.
Selon Michael Sanders, les jeux Web3 de deuxième génération utiliseront moins de fonctionnalités blockchain. De même, ils fonctionneront sur des infrastructures Web2 traditionnelles, comme les plateformes cloud.
Les marques de mode peuvent par exemple placer des jetons non fongibles et échangeables dans des environnements virtuels sur le Web2. De même, les grands studios de jeux, comme Ubisoft et Activision Blizzard, pourraient également permettre aux joueurs d’échanger les actifs de jeux créés par d’autres développeurs.
En fin de compte, Michael Sanders et Jérôme de Tychey sont tous deux d’accord sur une chose : les jeux blockchain doivent donner la priorité aux “jeux” plutôt qu’à la “blockchain”. Sinon, ils finiront par s’éteindre à petit feu.
Morale de l’histoire : Trop de technologie tue la technologie.
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