L’art de l’IA a fait la une des journaux dernièrement pour avoir battu les humains dans un concours d’art. Cela a suscité une tempête d’opinions contradictoires dans le milieu artistique. Maintenant, la bataille a connu une nouvelle tournure. Un roman graphique présentant des œuvres d’art générées par l’intelligence artificielle vient d’être publié il y a quelques jours.
Un roman illustré contenant des images hypnotiques générées par l’intelligence artificielle (IA) a fait son apparition dans les kiosques à journaux virtuels. Et il n’a fallu que 100 heures pour le concevoir.
Et voilà, le concept de l’art généré par l’intelligence artificielle a explosé. Tous ceux qui aiment l’idée du futur metaverse, notamment, sont fascinés par l’idée qu’une grande partie des mondes virtuels puisse être créée de la sorte. L’idée que le metaverse est encore plus proche que nous le pensons grâce à ce type de technologie s’avère alléchante pour les amateurs du monde virtuel.
Cela dit, pour l’instant, la question dérange encore de nombreuses personnes dans le monde de l’art.
L’art IA et les romans illustrés
L’auteur Kevin Hess est un amoureux inconditionnel de la science-fiction. Son livre préféré, Star Maker d’Olaf Stapledon, a été publié pour la première fois en 1937. Ce livre retrace l’histoire de la vie au sein de l’univers et aborde des idées philosophiques telles que le sens de la vie, la naissance et la mort, ou encore l’unité entre les civilisations. Le très célèbre auteur de science-fiction Sir Arthur C. Clarke a déclaré qu’il s’agissait “probablement de l’œuvre d’imagination la plus puissante jamais écrite”.
Kevin Hess a ainsi décidé de rendre hommage à son livre préféré (qui est désormais exempt de droits d’auteur en raison de son ancienneté) et de le réimaginer sous forme de roman graphique. Il a fait appel à Midjourney, une plateforme de génération d’œuvres d’art par l’IA, afin de créer ce qui pourrait être le tout premier roman entièrement illustré au monde. Et il ne s’agit pas seulement du premier roman entièrement illustré… Il s’agit du premier roman entièrement illustré et dont les illustrations ont été créées par une IA.
Et c’est là que les artistes hautement qualifiés qui ont étudié leur métier pendant des années commencent à s’énerver.
Transformer la littérature classique en romans illustrés
De nos jours, il existe de nombreuses adaptations en images de romans célèbres. Cependant, elles ne sont pas identiques aux romans originaux : en effet, elles ne comportent pas le texte intégral du roman et s’appuient ainsi sur l’art pour communiquer les parties manquantes. C’est en cela que le livre de Hess s’avère différent.
Au total, le roman graphique de Kevin Hess compte 706 pages entièrement illustrées. Il a déclaré à ce sujet : “j’ai voulu offrir l’aspect visuel d’un roman graphique et une histoire épique à un roman digne d’intérêt et quelque peu oublié. Il est pensé pour les lecteurs modernes d’une manière qui n’aurait tout simplement pas été possible jusqu’à présent. Star Maker est de loin mon roman préféré, et cela fait des années que j’essaie de le faire lire aux gens.”
Les débuts de l’art IA
M. Hess s’est essayé à l’écriture d’intelligence artificielle à des fins professionnelles, mais Wombo.ai a été le premier programme artistique IA qu’il a découvert. Selon lui, le rythme auquel ces programmes artistiques s’améliorent est absolument remarquable.
“Il s’agissait d’un outil vraiment intéressant, quoique rudimentaire. Il s’est avéré suffisamment intéressant pour me rester en tête. De même, lorsque j’ai vu affluer des exemples de meilleure qualité dans des projets tels que Midjourney et Stable Diffusion, je me suis jeté dessus et j’ai commencé à m’amuser avec.”
Selon Kevin Hess, chaque personne a une foule d’idées de ce qu’elle aimerait faire, mais il lui manque un élément essentiel. “Les gens aimeraient faire partie d’un groupe, mais ils ne savent pas jouer d’un instrument. Ou bien ils aimeraient écrire un roman, mais n’ont pas beaucoup de temps libre pour ça. Beaucoup de gens veulent raconter les histoires qui leur trottent dans la tête depuis des années. Pourntant, ils n’ont jamais eu la possibilité de créer l’art qui les accompagne. Ainsi, ils se trouvent soit coincés dans le marché encombré des nouvelles, soit ils doivent trouver un artiste ou développer eux-mêmes les compétences nécessaires.”
L’art par intelligence artitificielle et le monde réel
Nombreux sont ceux qui diront que, dans le cadre de ce projet, l’IA prend la place d’artistes qualifiés. Cependant, ce projet se serait alors avéré si coûteux qu’il n’aurait jamais été commissionné en premier lieu.
Selon Hess, “si l’on utilisait les méthodes artistiques traditionnelles, cela prendrait tellement de temps que l’on aurait du mal à le justifier pour illustrer autre chose que Harry Potter ou la Bible. Les coûts de production seraient exorbitants. Star Maker est un livre unique en son genre, qui se trouve être exactement ce que l’art IA peut accomplir de mieux en ce moment. Il présente des paysages extraterrestres luxuriants et des scènes simples.”
Selon Hess, le programme Midjourney excelle dans certains domaines, tandis qu’il s’avère absolument désastreux dans d’autres. “Il est très difficile de générer des scènes d’action – ou des figures humaines tout court. Vous ne pouvez pas créer le même personnage à plusieurs reprises, etc… Cependant, Star Maker est un livre inhabituel à plusieurs égards. Il ne possède presque pas de personnage principal : le narrateur prend rapidement la forme d’une présence désincarnée qui observe la montée et la chute des civilisations. Il n’y a pas de scènes de combat, mais beaucoup de réflexions et d’observations philosophiques. Les détails visuels précis de tout ce qui est décrit dans le livre ne sont pas particulièrement importants, et servent seulement à s’émerveiller. Par ailleurs, Midjourney possède son propre style artistique. Le programme est parfait pour l’ambiance onirique/atmosphérique de Star Maker”.
Midjourney est rapidement devenu l’un des outils favoris de création d’images parmi les plus uniques et de meilleure qualité grâce à l’intelligence artificielle. L’entreprise compte actuellement 11 employés à temps plein. Sur son site web, le projet se présente comme “un laboratoire de recherche indépendant explorant de nouveaux supports de pensée et développant les pouvoirs imaginatifs de l’espèce humaine”.
Les délais de production
Kevin Hess a réussi à générer la majeure partie des images au cours des six premiers jours. Le reste du travail de la semaine suivante a consisté à réaliser la mise en page, le lettrage, la correction des erreurs, une seconde vérification de tout le projet, etc… En tout, l’auteur affirme que le projet a exigé environ 100 heures de travail du début à la fin.
“Pour l’instant, l’art par IA n’est pas très performant pour produire des images sur mesure d’humains en train d’accomplir des actions spécifiques. Ainsi, une épopée de 40 000 pages des aventures complètes des Hardy Boys ne serait pas aussi facile qu’il y paraît. Si vous avez simplement besoin de gratte-ciel, de cerisiers en fleurs ou d’un ours en peluche, et que vous n’avez pas besoin de les reproduire plusieurs fois, c’est parfait. Si vous avez besoin de soixante-dix planches du même personnage effectuant trente actions complexes, pour le moment, vous n’y arriverez jamais avec l’art de l’intelligence artificielle.”
M. Hess affirme que si Star Maker s’avère suffisamment populaire, il réalisera le prochain livre de Stapledon, et peut-être même L’Enfer de Dante ou l’Apocalypse.
“C’est très sympa d’être (potentiellement) le premier dans l’histoire de l’humanité à réaliser quelque chose de bien particulier, et un roman complet entièrement illustré est autrement plus important qu’un record du monde Guinness pour avoir empilé des gobelets sur son menton.”
La version de Kevin Hess de Star Maker est disponible sur Google Play et Amazon depuis le 17 septembre.
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