Alors que les organisations autonomes décentralisées (DAO) commencent à gagner du terrain à l’intérieur comme à l’extérieur de l’espace crypto, de plus en plus de questions se posent au sujet de ces communautés décentralisées.
Dans le secteur en pleine mutation de la crypto et des nouvelles technologies blockchain, le dictionnaire des mots à la mode continue de s’allonger. Pendant un certain temps, les tokens non fongibles (NFT) faisaient la une de tous les journaux. Sans oublier Bitcoin et la finance décentralisée (DeFi), qui sont désormais des sujets prédominants dans la presse spécialisée et même généraliste.
Cependant, depuis quelques mois, les projecteurs se sont tournés vers une autre dimension du métavers. Aujourd’hui, les organisations autonomes décentralisées, ou DAO, sont sur toutes les pages et toutes les langues. En effet, les DAO sont venues résoudre le problème de la légitimité de la gouvernance. Mais qui détient vraiment le contrôle, et à quelles fins ?
Ces organisations décentralisées se décrivent comme étant pleinement opérationnelles au travers de la communauté qui les compose. Ceci bien sûr, est ce qui se produit dans le cas d’un scénario parfait, car les DAO en tant que concept crypto et blockchain sont encore assez récentes. Par conséquent, leurs dysfonctionnements sont toujours en cours de correction.
En effet, les DAO se basent sur des règles codées par un programme informatique transparent. Les membres de la communauté ont un contrôle collectif sur le programme, ce qui élimine le besoin d’une gouvernance centrale.
De nombreux passionnés de crypto ont raison de croire que les DAO sont l’avenir de la façon dont les gens travailleront, rassembleront les communautés et s’organiseront de manière générale.
Certains DAO commencent déjà à faire du chemin. L’été dernier, American CryptoFed est devenue la première DAO légalement reconnue aux Etats-Unis. En septembre, une DAO basée au Wyoming a déposé une demande d’enregistrement auprès de la SEC, la première initiative de ce type.
Où est l’argent ?
Alors que ces organisations autonomes décentralisées deviennent plus nombreuses et mieux reconnues par les régulateurs, de plus en plus de questions se posent.
Par exemple, le fonctionnement des DAO et leurs droits de vote restent flous pour certains. En outre, plusieurs questions se posent sur la répartition des fonds au sein de ces organisations.
Pour répondre à ces questions, BeInCrypto a interrogé Red, le représentant de la communauté de Harvest Finance, sur les rouages du financement des DAO. Selon lui, la gestion du financement est la base de tout le protocole.
“Au lieu de vendre directement ces tokens ou de s’en débarrasser sur le marché libre, qui est une source de financement typique pour les DAO. S’il existe un protocole au moment de son lancement, il peut émettre des tokens à la DAO, ou dans le cadre du plan financier du protocole”, a-t-il expliqué.
Les prêteurs de la DeFi
Red a également mentionné le rôle des prêteurs au sein de la DeFi en tant qu’outil de financement des DAO. Il s’agit, là encore, d’un sujet important au sein de l’industrie crypto.
“On peut tirer parti d’un protocole de prêt, comme Aave ou MakerDAO, qui, concrètement, vous permet de bénéficier de prêts en déposant des tokens en garantie. La plupart d’entre eux proposent un taux de garantie de 20 à 60 %, auquel peut s’ajouter un taux d’intérêt très bas pour le prêt”, a-t il souligné
On n’oublie pas les NFT
Cependant, ce n’est pas tout. Selon les Red, les NFT demeurent des méthodes de financement innovantes et uniques en leur genre.
“Par exemple, en ce moment, les NFT ont le vent en poupe. Harvest Finance a organisé une vente artistique en collaboration avec un artiste mandaté pour créer des images agréables sur le thème de l’éthique de Harvest Finance. Ensuite, nous avons sorti différentes versions de ces NFT, qui ont ensuite été données aux acheteurs. Ces tokens servent de tickets pour les événements spéciaux que nous co-organisons. Prenons l’exemple de Babylon Finance, qui est un projet avec lequel nous collaborons, et qui collecte également des fonds via des NFT. En tant que détenteur d’un NFT Harvest Finance, vous bénéficiez d’un accès exclusif aux offres de Babylon Finance”, a-t-il expliqué.
En outre, certaines DAO offrent des fonctionnalités similaires à des cartes d’adhésion. Pour illustrer ses propos, Red a mentionné une DAO axée sur l’art qui fonctionne de cette manière.
“Gen.Art vend essentiellement un pass qui permet de bénéficier d’un airdrop de créations d’artistes de la plateforme. Ce ticket donne également des droits de vote pour accepter d’autres artistes, etc”.
Une rupture avec les structures traditionnelles
En comparaison avec les structures d’entreprises standard, les DAO brisent l’architecture hiérarchique traditionnelle de gouvernance et de délégation. Cependant, il peut être difficile de faire la distinction entre une DAO et une entreprise centralisée si cette dernière utilise des protocoles décentralisés.
“Si Bank of America (BoA) déploie une application décentralisée, elle reste la Bank of America. Si nous voulons tous concrétiser notre vision de la crypto, c’est-à-dire un espace qui ne dépend ni de l’homme ni des structures bancaires gouvernementales ni de quoi que ce soit d’autre, alors nous ne pouvons pas accepter ces organisations centralisées qui utilisent un code décentralisé”, a souligné Red.
“Sinon, vous ouvrez la porte à la BoA pour qu’elle déploie ces éléments et vous obtenez des pseudo-DAO. En fin de compte, ils incitent les gens à faire des opérations bancaires sur la blockchain, n’est-ce pas ? Ce qui n’est pas du tout le but”, a-t-il expliqué.
En revanche, pour Harvest Finance, par exemple, Red a évoqué les portefeuilles multi-signatures gérés par des DAO, qui constituent le noyau de la prise de décision pour l’organisation.
“C’est fondamentalement comme n’importe quel portefeuille crypto normal. Cela dit, pour qu’une transaction soit exécutée ou validée dans ce portefeuille, plusieurs personnes doivent la signer. N’importe qui peut initier une transaction”, a-t-il précisé.
“Il y a beaucoup plus de fonds opérationnels détenus à la discrétion des développeurs de Harvest, ce qui ressemble un peu à la trésorerie définie lors de la mise en place du projet. Mais au fil du temps, la DAO elle-même a développé sa propre trésorerie, avec l’aide des principaux développeurs. C’est comme si nous y mettions les bénéfices du protocole pour nous alimenter en cours de route”.
Le changement dont dépendent les DAO
Cette rupture avec l’essence de l’entreprise, en termes de trésorerie et de manière plus globale, est ce qui distingue vraiment les DAO. Il ne s’agit pas seulement du vote démocratisé, mais de la rupture initiée par la communauté avec le contrôle centralisé.
“Toutes les personnes au sein d’une organisation doivent utiliser le vote. Cependant, vous ne pouvez pas dire que vous êtes une DAO simplement parce que vous possédez un mécanisme de vote. En effet, vous devez développer votre organisation de sorte à ce qu’elle se détache des personnes qui ont lancé le protocole. Ensuite, vous devez intégrer des membres de la communauté et des personnes décentralisées pour remplir ces rôles. Ce n’est qu’après avoir fait tout cela que vous pouvez donner le nom de DAO à votre organisation. Même si vous ne votez pas sur tout à gauche et à droite, vous devez vous assurer de voter sur les choses importantes”, a expliqué Red.
Des DAO ou rien
Les DAO sont apparues bien avant 2020 et 2021. En effet, une grosse affaire impliquant une DAO avait éclaté en 2016. L’organisation avait subi de graves failles de sécurité et, par conséquent, perdu sa crédibilité. Mais qu’en est-il de cette période de l’histoire du paysage numérique où les DAO sont sur toutes les lèvres ?
“Eh bien, pour ma part, je pense juste à la montée en puissance de projets viables”, a poursuivi Red. “Contrairement à avant, comme en 2017 avec le boom des ICO. Toute la collecte de fonds était basée sur les promesses des livres blancs de construire quelque chose avec peu de choses concrètes. C’est un peu difficile d’avoir une DAO quand on n’a même pas de produit.”
Cependant, aujourd’hui, les choses ont changé. La communauté du développement décentralisé est en plein essor, avec des projets qui attirent considérablement les investisseurs et les plateformes traditionnelles.
Red a même évoqué les évolutions de la DeFi qui aident à faire avancer les DAO.
“Vous avez la montée en puissance de l’agriculture de rendement, ou yield farming, où les tokens sont presque émis gratuitement en quelque sorte. Tant que vous déposez des liquidités sur un protocole, vous pouvez “cultiver” des tokens et les obtenir gratuitement. Eh bien, cela encourage la participation, parce que les gens peuvent recevoir quelque chose gratuitement. Il se demandent alors : ‘qu’est-ce que cela peut faire ? Puis-je participer ?’.
En outre, selon Red, de plus en plus de personnes sont “confrontées à Internet” après la dernière pandémie.
“Dans les médias, on voit que beaucoup de gens refusent de retourner à une vie de bureau normale et quotidienne. Le travail des DAO se fait en ligne, ce qui permet de travailler à domicile. C’est presque la même chose qu’Uber, dans le sens où n’importe qui peut s’y lancer et y travailler sans problèmes. Ainsi, i j’ai une voiture, tout ce que j’ai à faire est de me connecter à cette application, puis commencer à travailler. Tant que je ne suis pas un mauvais conducteur, bien sûr. C’est très stimulant”, a-t-il poursuivi.
Un lieu d’exploration
À une époque où les gens recherchent de nouveaux sillons pour leur identité numérique, les DAO offrent un lieu propice à cette exploration.
“La décentralisation accueille n’importe qui, et tout le monde est à l’aise avec l’idée d’être n’importe qui. Regardez sur Internet ; du courage au clavier, n’est-ce pas ? Il est donc certainement très encourageant que quelqu’un puisse rejoindre un projet crypto où les gens ont tendance à être très amicaux et serviables. N’importe qui peut travailler dans une DAO sans discrimination de race, de religion, de croyance ; peu importe. Vous n’êtes personne. Et ces personnes peuvent avoir beaucoup de pouvoir. Comme moi, je ne suis personne”.
D’ailleurs, Red a souligné que malgré son manque de connaissances techniques, ses contributions à sa DAO par d’autres moyens sont quelque chose dont beaucoup ont besoin pour faire face à cette vague d’intérêt pour les DAO.
“Vous savez, tout le monde, toutes ces organisations ont besoin de développeurs, mais elles ont aussi besoin de gestionnaires de risques, de réseauteurs, de communicateurs, de services clients et de rédacteurs de documents, n’est-ce pas ? Cela ne peut pas être destiné qu’aux développeurs”.
“Finalement, dans un sens, ce sont les DAO qui sont plus puissantes que les développeurs qui déploient initialement le protocole du produit. Parce qu’à terme, le code va être perfectionné, à un point où la majorité du travail nécessaire sera effectué par l’organisation décentralisée, et non par les développeurs eux-mêmes”.
Avec cet esprit centré sur la communauté, l’entrée des DAO sous les feux de la rampe sera aisée. L’offre des DAO existantes continue également à s’élargir.
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